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jeudi, novembre 29, 2012

Le Kon-Tiki


LUNDI 28 NOVEMBRE 2011

L’arrivée des Rapanuis à Rapa Nui

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Carte de Rapa Nui, University of Texas Libraries, 1986
Le très fameux triangle de terre, issu de l’éruption de trois volcans (Poike, Rano Kau puis Maunga Terevaka, successivement émergés de l’océan Pacifique et formant ses extrémités), est si petit et si isolé (à 2 000 km des îles les plus proches, celles de Pitcairn) qu’on s’est demandé si sa culture n’était pas sortie de l’île comme l’île l’était de la mer. Non pas finalement comme le continent perdu de l’Atlantide, mais comme un continent nouveau-né. Neuf. Bien d’autres théories farfelues ont été émises.
D’où viennent donc les Rapanuis ? Je ne résiste pas à la tentation de vous raconter l’histoire de l’ethnologue norvégien Thor Heyerdahl, qui nous donne une idée des folies qui peuvent guider les humains quand il s’agit de comprendre le monde. Sa réputation lui vient de ses nombreuses expéditions en mer, dans d’improbables embarcations. Dans les années 1940, il était absolument convaincu que le peuplement de la Polynésie s’était fait à partir des côtes sud-américaines. Il avait entendu réciter sur les îles des généalogies entières, qui toutes parlaient d’un ancêtre blanc, que l’on retrouvait au Pérou comme à l’origine des populations de ces îles. Sa théorie fut déboutée par ses congénères, qui y opposaient l’argument selon lequel il aurait été impossible de traverser le Pacifique avec les embarcations de l’époque.
Qu’à cela ne tienne, le Norvégien, moitié inconscient moitié scientifique à la foi sans faille (étrange oxymore), monte son expédition, avec cinq autres hommes, pour tenter la traversée sur un radeau de balsa (un bois particulièrement léger utilisé par les navigateurs), le Kon-Tiki. Il raconte son voyage dans L’expédition du « Kon-Tiki », du nom originel du dieu-soleil inca Virakocha, récit dont on pourra regretter au passage l’absence totale de discussions ethnologiques – si ce n’est quelques considérations sur l’île de Pâques, justement – et la surreprésentation des rencontres poissonneuses. Les curieux pourront voir le radeau en question en Norvège, au musée du Kon-Tiki d’Oslo – bien qu’à la lecture du récit de l’arrivée pour le moins fracassante de l’embarcation sur les côtes des îles Tuamotu, on suppose qu’il a dû être sinon reconstitué, du moins sacrément rafistolé. 
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Couverture de L'expédition du « Kon-Tiki » de Thor Heyerdahl, éd. Phébus
Contre toute attente, en 1947, Heyerdahl est parvenu à parcourir en 101 jours les 8 000 km séparant les côtes péruviennes des îles Tuamotu. Il avait raison : c’était possible. Le balsa sous forme de radeau permet d’affronter les vagues les plus hautes, puisqu’il monte avec elles et ne prend pas l’eau.
Et il avait tort (mais n’est-ce pas là le destin de tout scientifique, qui n’en apporte pas moins sa contribution à l’histoire des sciences) : d’après l’étude de l’outillage, des coutumes religieuses et artistiques et de la génétique, il semblerait que les Polynésiens viennent d’Océanie (le peuplement serait venu d’Asie, via la Nouvelle-Calédonie). Quant aux premiers habitants de Rapa Nui, on suppose qu'ils venaient des îles Marquises, à 3 200 km de là.
Autant  pour le Norvégien, les Rapanuis, en bons Polynésiens, n’ont donc rien d’américain. Si ce n’est qu’entre le peuplement de l'île et aujourd’hui, l’histoire a mis son grain de sel, rendant Rapa Nui… chilienne.  ( Depuis 1788/ ON SE DEMANDE ENCORE DE QUEL DROIT )